Publié le 31 Mars 2025
Tranquille comme c’était, il ne poussa pas de marguerites à l’automne 1941. À l’époque, nous avons pensé que c’était parce que Pecola allait avoir le bébé de son père, que les marguerites ne poussaient pas
Enfance volée
Ces premières lignes qui suivent deux pages d’une sorte de comptine ou de ritournelle, annonce frontalement la couleur. Nous allons plonger dans le sordide, la noirceur.
Pecola Breedlove est une petite Noire de onze ans au début du roman. Elle est racontée à travers les yeux de son amie Claudia. Pecola se trouve laide parce qu’elle est noire. Elle aimerait avoir les yeux bleus comme Shirley Temple. Elle est persuadée que si elle avait les yeux bleus, sa vie changerait radicalement. Claudia n’est pas d’accord avec elle. Elle déteste ses poupées blanches et elle ne veut pas se conformer aux Blancs même si elle a conscience que les Métis sont mieux traités que les Noirs. Le racisme systémique dans cette Amérique des années 40 développe le colorisme dans la population noire, cette idée que plus on tend vers le blanc, mieux c’est.
Comment peut-on se construire dans un monde qui nous rejette ?
A travers le récit de Claudia, alterné par des chapitres par un autre narrateur qui met en lumière (ou en obscurité) la vie d’autres personnages, Toni Morrison montre comment le rejet conduit au rejet et la violence conduit à la violence sans pour autant trouver des excuses aux actes des protagonistes.
Claudia est le contrepoint, l’envers du miroir de Pecola. Là où Pecola ne connaît que la violence et se construit ainsi dans le rejet de sa personne, Claudia a la chance d’avoir une forme de stabilité familiale qui l’aide à se construire en tant que noire. Quand Frieda, la sœur de Claudia, subit une violence, la famille réagit là où Pecola est abandonnée, livrée à elle-même. La société laisse des traces sur les êtres mais ceux-ci peuvent aussi agir contre elle.
Ce premier roman n’est pas parmi mes préférés de l’autrice mais Toni Morrison pose les jalons de sa future œuvre, avec ses thèmes récurrents, le tout dans une langue crue, rugueuse qui claque le lecteur à chaque page.
Ce roman a été régulièrement censuré dans les bibliothèques scolaires et les médiathèques américaines. Ces dernières semaines, il fait partie avec Beloved des romans censurés à grande échelle dans le pays.
Lisons donc Toni Morrison.
Traduit de l’anglais par Jean Guiloineau.
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